10 mars 1906 : la catastrophe de Courrières
Posté par Joël le 9 mars 2010
Le 10 mars 1906, la plus importante catastrophe minière d’Europe, dite catastrophe de Courrières fit officiellement 1.099 morts.
Alors qu’il y a un mois on nous annonçait la candidature du bassin minier au patrimoine mondial de l’UNESCO, la commémoration de ce triste évènement historique sera peut être sensiblement occultée par des préoccupations d’un futur proche.
Même si Beuvry n’est pas directement lié à ce drame, notre devoir de mémoire doit rester intact envers ces victimes, celles de toutes les autres catastrophes minières, mais aussi pour le sacrifice des mineurs de fond (en particulier sur leur santé).
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À 6 h 34, le samedi 10 mars 1906, un terrible bruit sourd et une secousse se font sentir en surface des puits de mines, des nuages de poussières sortent des fosses…
Un coup de grisou suivi d’un coup de poussière d’une rare violence ravagent en quelques secondes 110 kilomètres de galeries communes aux trois fosses et situées sur les territoires de Billy-Montigny (fosse n° 2 dite Auguste LAVAURS), Méricourt (fosse n° 3 dite LAVALERESSE ou Charles BOCA), Noyelles-sous-Lens et Sallaumines (fosse n° 4/11 dite Sainte-Barbe ou Charles DEROME). Les trois puits de Mines touchés faisaient partie du groupe minier de la société de courrières.
Quelques mineurs parviennent à remonter et à donner l’alerte. Les secours sont organisés rapidement. La nouvelle d’un coup de grisou se répand dans les corons comme une traînée de poudre. Vers les puits sinistrés, c’est aussitôt la course, la ruée d’épouses, de mères, d’enfants et de parents, de mineurs. Devant le carreau des fosses les grilles sont fermées. La foule s’agite, menace d’envahir le carreau de fosse. Les gendarmes ont peine à la contenir.
Quarante-huit heures après la catastrophe, les sapeurs-pompiers de Paris arrivent sur les lieux, épaulés par les sauveteurs des compagnies de la Ruhr qui sont équipés d’appareils respiratoires d’une conception nouvelle. |
Terrible bilan : 1 099 victimes, des familles entières sont décimées.
L’accident fit officiellement 1 099 morts sur près de 1 800 mineurs descendus ce jour-là.
Mais le bilan réel est probablement supérieur en raison de la présence de travailleurs « irréguliers » dont le décès n’a pas été imputé à cet accident. Pris au piège, la plupart des ouvriers sont morts asphyxiés ou brûlés par les nuées ardentes de gaz toxiques.
En fin de journée, seulement 576 mineurs étaient parvenus à s’échapper de la catastrophe.
Treize rescapés seront remontés le 30 mars du puits N°2 de Billy-Montigny, après 20 jours d’errance au fond de la mine, et un dernier le 4 avril, soit 25 jours après la catastrophe. Il n’y aura pas d’autres rescapés !
À ces pertes il faut ajouter le décès d’au moins seize sauveteurs. |
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Pourquoi une telle catastrophe ?
Deux causes essentielles expliqueraient le désastre : le coup de grisou et le coup de poussière.
Le grisou est un gaz composé essentiellement de méthane. Il présente un énorme risque à cause de son caractère explosif au contact d’une étincelle (on a mis en cause l’utilisation des lampes à feu nu).
Le coup de poussière correspond à l’inflammation violente de grandes quantités de poussière de charbon en suspension. Cette combustion très rapide se propage et engendre avec elle une surpression et une explosion.
Cette catastrophe serait due à la combinaison de ces deux phénomènes.
Par ailleurs, la compagnie minière avait pratiqué d’importants travaux pour réaliser l’interconnexion entre ses différents puits. Ce dispositif, sensé permettre l’évacuation des mineurs, entraîna la propagation de l’incendie dans les différentes fosses.
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Plus jamais ça !
Cette catastrophe fut suivie de nombreuses polémiques. On accusait la compagnie de Courrières d’avoir poursuivi l’exploitation de la mine alors qu’un incendie, découvert trois jours plus tôt, n’avait pas encore été complètement maîtrisé. La gestion de la crise fut également critiquée, notamment la décision de l’ingénieur en chef des mines, de stopper les recherches d’éventuels rescapés, trois jours seulement après l’explosion. Des manifestations et des grèves, éclatèrent. Ce mouvement social déboucha sur l’instauration du repos hebdomadaire. De plus, la catastrophe a entraîné des actions de prévention avec en particulier des sessions de formation. En 1907, le premier poste central de secours du bassin Nord-Pas-de-Calais est créé à Liévin. On y forme des équipes spécialisées de sauveteurs et on y étudie les risques dus au grisou et au poussier. Les lampes à feu nu sont bannies au profit des lampes dites de sûreté (lampes Davy). |
Liens :
Catastrophe de Courrières sur Ch’ti.org
Une catastrophe d’une ampleur sans précédent (sur Hérodote.net)
Dossier sur le site La Voix du Nord
Centre historique minier de Lewarde
Cliquez pour télécharger un diaporama (format PPS) que j’ai réalisé sur la catastrophe de courrières
Bien vu !
La préoccupation des élus n’est pas dans le respect de ceux qui on fait que la France est la France ni dans ceux qui ont donner leur vie pour développer l’économie de la région avec les mines. Les milliers de mineurs qui ont sacrifié leur espérance de vie et qui ont redressé la France après les 2 guerres ne sont pas reconnus.
Bravo pour toutes les informations passionnantes que vous nous faites partager.
Merci François pour ce compliment.
J’ai effectivement remarqué que certaines personnes avaient une capacité d’indignation ou un devoir de mémoire, ou encore menaient un combat pour le droit des femmes à géométrie variable. Et ce, quel que soit leur courant de pensée.
Certains thèmes traités dans ce blog peuvent paraître un peu loin du sujet principal : Beuvry.
Pourtant Beuvry n’est pas étranger au passé minier.
D’abord, n’oublions pas que Beuvry a connu une activité importante pendant la période d’extraction minière.
De nombreux mineurs habitaient Beuvry. Une centrale thermique alimentée au charbon se trouvait sur le territoire de la commune. Le Rivage de Beuvry via le « canal de la compagnie des mines de Noeux « , embranché sur le canal d’Aire à La Bassée, servait à charger le charbon dans des péniches pour alimenter notamment Paris.
Ensuite, la population actuelle de Beuvry n’est pas faite exclusivement de natifs de Beuvry.
J’ai entendu à ce sujet des conversations choquantes lors d’une inauguration à Beuvry : » mi ch’suis nèe à Beuvry mes parints aussi… » Je tairai la suite ; d’autres personnes insistent un peu trop à mon goût sur cette appartenance à Beuvry.
Nombreux Beuvrygeois qui s’intéressent sincèrement à la vie de la commune ne sont pas nés, n’y ont pas travaillé, n’y ont pas vécu toute leur vie. Ils n’en sont pas moins attachés. Certains ne parlent même pas patois » hou, quelle honte ! » (je plaisante)
Parmi ces « faux » Beuvrygeois beaucoup viennent du bassin miniers et plusieurs ont leur père et leurs grand pères qui ont sacrifié leur santé dans cet enfer.
Réaliser quelques articles sur la candidature du bassin minier au patrimoine de l’UNESCO ou sur les victimes des catastrophes minières est le minimum que l’on puisse faire, (quitte à ne dormir que quelques heures pour terminer la mise en page de l’article).
Votre commentaire ainsi que les messages que j’ai reçus lors de mon article sur la candidature de bassin minier m’ont beaucoup touchés, encore merci.
Bonsoir Joël
Je découvre votre site. Très bien les photos et les explications diverses sur BEUVRY. Je fais ma généalogie et je constate que mes AGP étaient natifs de BEUVRY. Mon AGP était mineur, il est décédé entre 1906 et 1920 (déjà DCD lors du mariage de sa fille, ma GM). S’il a été victime de la catastrophe de COURRIERES,comment puis-je trouver la liste des mineurs DCD ? certaines de vos photographies représentent des stèles, des monuments autres que les Monuments aux Morts des deux conflits du XXème siècle. Auriez-vous l’obligeance de consulter si Jean Baptiste WILLEMS et des BAUDRIN seraient susceptibles de figurer sur ces plaques commémoratives ?
Par ailleurs, quel fleuve traverse BEUVRY, en 1906, la famille habitait « au canal, vers l’embouchure » ; j’ai regardé sur internet mais n’ai rien trouvé.
Je vous remercie très chaleureusement par avance
Cordialement
Merci pour votre visite sur ce blog.
Je vous ai répondu par mail.
J’espère trouver des informations complémentaires.
il y a bien un habitant décédé a la catastrophe :
LEGRAND Justin Fosse 3 houilleur habitnt à Méricourt Lavaleresse 20 ans célibataire né à Beuvry 25/12/1885 Fils de Justin Henri Joseph houilleur et de Hortense LEFORT Ménagère à Méricourt Lavaleresse
complément sur http://fouquiereschf.free.fr/histoire/courrieres%201906/billy_au_coeur_de_la_catastrophe.htm
Cordialement
Merci beaucoup pour cette information.
Je commence à faire la généalogie de mon mari et là je constate 2 ancêtres décédés le 10/03/1906 à la fosse 3 à Méricourt l’un avait 27 ans marié et père de 3 enfants et l’autre allait avoir 20 ans .
Une pensée pour toutes ces personnes qui ont vécus cette tragédie, ça n’a pas du être facile.
Cet article est très émouvant et important pour la mémoire des victimes et pour leur descendance. Un grand MERCI.
Précisions suite à un échange de commentaires sur un réseau social :
En effet, la catastrophe dite de Courrières s’est produite sur 110 kilomètres de galeries communes aux trois fosses et situées sur les territoires de Billy-Montigny (fosse n° 2 dite Auguste LAVAURS), Méricourt (fosse n° 3 dite LAVALERESSE ou Charles BOCA), Noyelles-sous-Lens et Sallaumines (fosse n° 4/11 dite Sainte-Barbe ou Charles DEROME).
Les trois puits de Mines touchés faisaient partie du groupe minier de la société de courrières.
60% des victimes étaient d’ailleurs domiciliées dans ces 3 communes et presque 30% à Sallaumines.
La compagnie avait fait passer la rentabilité avant la sécurité. En conséquence une grève éclate sur tout le bassin houiller (jusqu’à 60.000 grévistes). Ceci a peut-être contribué à chercher une main d’oeuvre ailleurs ?…
La grève déboucha sur l’instauration du repos hebdomadaire et marqua le début de l’immigration nord-africaine dans le Nord-Pas-de-Calais. Neuf cents Kabyles ont été embauchés pour effectuer les travaux les plus pénibles et dangereux à la suite de la catastrophe. Sur recommandation du prince polonais Witold Czartoryski, actionnaire de la Compagnie des mines d’Anzin, la compagnie embauche également des mineurs « Polonais » qui avaient d’abord travaillé dans les mines de la Rhur.
Des mineurs « Westphaliens » sont aussi recrutés par les compagnies de Nœux et d’Aniche.
Les compagnies recruteront ensuite directement en Pologne après la première guerre Mondiale.